Le Journal du Recouvrement

Le Journal du Recouvrement

Délais de paiement : la Commission d'examen des pratiques commerciales répond aux questions

Dans la rubrique La réglementation en vigueur

 

Afficher l'image d'origineLes délais de paiement entre professionnels sont régis par l’article L 441-6 du Code de commerce qui en précise les modalités d’application et tout particulièrement l’échéance et le taux d’intérêt en cas de retard. Malgré un encadrement strict des délais applicables en matière commerciale, certaines pratiques déloyales, voire abusives, sont régulièrement constatées, créant de fait un déséquilibre entre les co-contractants. Quelles réponses apporte la Commission d’examen des pratiques commerciales aux principales questions (facturation, livraison, litige…) liées à ces délais de paiement ?

 

 

- Escomptes / Les débiteurs peuvent-ils exiger de leurs créanciers une «compensation» du fait de la réduction des délais de paiement ?

 

La question des délais de paiement est prise en compte dans les négociations commerciales. Il ne peut donc y avoir mécaniquement de compensation, en cas de paiement anticipé, si celui-ci n’a pas été prévu à la signature du contrat.

 

 

- Compensations / Est-il légal de négocier des compensations à la réduction des délais de paiement - Quel peut-être le taux de cette compensation ?

 

Oui. Rien n’interdit une remise en cas de paiement anticipé si elle est acceptée par toutes les parties. Le taux de la compensation d’une réduction des délais de paiement ne doit néanmoins pas être abusif. Il ne peut créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

 

 

- Facturation / Est-il légal de délocaliser à l’étranger son centre de facturation, ou de facturer par une filiale à l’étranger, pour ne pas être obligé de respecter la réduction des délais de paiement.

 

Non. Une entreprise qui, pour négocier des délais de paiement avantageux, fait adresser à ses clients des factures par une entreprise étrangère contourne la loi.

 

 

- Livraisons / Est-il légal d’imposer des livraisons pour six mois de stocks quand le client doit payer à 60 jours ?

 

Non si cette contrainte crée un déséquilibre significatif au détriment du co-contractant. L’article L 420-2 du code de commerce prohibe l’exploitation abusive par une entreprise d’une position dominante sur son marché.

 

 

- Détournement / Est-il légal de conclure un nouveau système de vente en consignation pour n’engager le début du délai de paiement qu’après la vente effective des produits ?

 

Non. A l’identique des questions précédentes, s’il s’agit manifestement de «détourner» ou de «contourner» la loi, la vente en consignation, utilisée contrairement aux habitudes anciennes, est une pratique abusive.

 

 

- Facture à réception / Dans les marchés de travaux, l’envoi de la facture par chaque prestataire est souvent conditionné à la réception globale du marché. Cette réception peut avoir lieu plusieurs mois après la fin des travaux d’un prestataire individuel. Est-il de bonne pratique de retarder ainsi la date d’émission de la facture ?

 

L’article L 442-6 du code de commerce sanctionne le débiteur qui demande au créancier sans raison objective de différer la date d’émission de la facture. Ainsi, la réception des marchés de travaux ne doit pas être utilisée abusivement pour retarder la date d’émission de la facture.

 

 

- litige /  Un litige peut-il suspendre le délai ?

 

Si c’est un litige exceptionnel comme par exemple une fois dans l’année, le délai, voire le paiement peut effectivement être remis. A l’inverse la généralisation ou la multiplication de litiges ne peut servir de prétexte au non-respect des délais de paiement.

 

Même en cas de litige, la facture doit toujours être émise. Un simple litige ne constitue pas une raison objective pour ne pas émettre ou régler une facture, au sens du 7èment  du I de l’article L. 442-6 du code de commerce et ne doit pas servir de prétexte pour retarder le paiement.

Une facture doit donc être réglée à l’échéance convenue sauf en présence d’une contestation fondée et sérieuse ; le fournisseur doit alors être en mesure, par l’acheteur, de contrôler la réalité du grief.

 

Si la contestation ne concerne qu’une partie de la commande ou de la prestation facturée, seul le montant correspondant à la livraison ou à la prestation litigieuse peut être suspendu ; le reste de la facture doit être payé dans les délais prévus au contrat. Mais, afin de préserver ses droits, l’acheteur qui refuse de régler tout ou partie de la facture doit se faire autoriser par le juge des référés, statuant en urgence, à le dispenser de payer le fournisseur en ordonnant, au besoin, la consignation de tout ou partie de la somme litigieuse entre les mains d’un tiers.

A défaut, le fournisseur est en droit de demander en justice le paiement du montant intégral de la facture augmenté des intérêts de retard, de dommages-intérêts éventuels et d’une contribution aux frais de justice et d’avocat (art. 700 CPC)

 

 

- Difficultés du Client / Peut-on appliquer un moratoire en cas de difficultés passagères du client ?

 

Sans intervention du juge, un créancier peut arbitrairement accepter un échéancier de paiement à condition qu’il ne se trouve pas en situation de faiblesse économique par rapport à son débiteur, n’ait par ailleurs pas été soumis à des pressions abusives et que le débiteur connaisse une véritable crise de trésorerie à caractère conjoncturel.

 

 

Philippe Bernis (Direct Recouvrement)



21/03/2016
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 2604 autres membres