Le Journal du Recouvrement

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Retards de paiement : « Un mail ou un courrier sans réponse doit alerter une entreprise »

Dans la rubrique Recouvrement : l'oeil des pros

 

Délais de paiement.jpgCrise covid-19 ou pas, un autre fléau frappe régulièrement les PME françaises : les retards de paiement, voire les impayés. Chaque année, des milliers d’entreprises se retrouvent contraintes de mettre la clé sous la porte par la faute de clients qui ne parviennent à tenir leurs engagements. S’en suit alors un effet domino, préjudiciable à l’ensemble de la chaîne commerciale. Philippe Bernis, fondateur de Recouvr’up, une plate-forme qui lutte contre les impayés et a fortiori pour la sécurisation des relations commerciales, s’est attaqué au fléau.

 

Lorsque vous avez créé Recouvr’up en 2016, vous partiez d’un constat inquiétant : des milliers de PME déposent le bilan pour des motifs d’impayés ou retards de paiement ?

Effectivement. Des études ont été réalisées en France qui montraient que le retard moyen de paiement, en France, atteignait 13 jours. Quand on dit 13 jours, on parle là d’un délai supplémentaire qui intervient déjà après le délai légal et contractuel accordé dans notre pays qui correspond à 30 jours. En France, nous sommes les spécialistes des retards de paiement, les entreprises ont l’habitude de payer avec des retards ou même – parfois – ne paient pas du tout. Très problématique, puisque chaque année et hors covid, environ 60 000 entreprises déposent le bilan dont un quart s’explique par des difficultés d’encaissement.

 

Autrement dit, vous avez des entreprises qui fonctionnent bien, avec des carnets de commandes bien remplis, mais qui demeurent contraintes de déposer le bilan car leurs clients ne les paient pas à échéance. Tout ça pèse sur la trésorerie et peut déboucher sur un effet domino : l’entreprise non payée va se retrouver, elle aussi, dans l’urgence de devoir régler ses fournisseurs…

 

Que pensez-vous du name and shame opéré par Bercy pour afficher publiquement les mauvais payeurs ?

C’est une pratique qui vient du monde anglo-américain, de l’Angleterre et des États-Unis. Je pense que tout demeure bon à prendre pour lutter contre les délais de paiement et donc combattre les mauvais payeurs. Après, s’agit-il réellement d’une mesure efficace ? Je n’en suis pas convaincu. Car seules quelques entreprises se révèlent affichées publiquement, et très majoritairement les grands groupes, donc difficile d’analyser l’efficacité de la mesure. Bercy doit nommer ces entreprises, mais n’audite que les grands groupes, donc beaucoup d’entreprises restent dans l’anonymat alors qu’elles présentent les caractéristiques du mauvais payeur.

 

Donc, oui, le name and shame m’apparaît utile… pour les grands groupes uniquement, mais ce n’est pas suffisant puisque les relations commerciales fonctionnent en chaîne.

 

Y-a-t-il des signes pour les PME qui laissent pressentir que leurs clients aboutiront à un impayé ?

Dès les premiers jours après une échéance, il faut absolument réagir pour les PME. Tout est question de réactivité. On observe une corrélation entre l’ancienneté d’une facture et le taux de réussite en recouvrement de créance. Plus une facture apparaît ancienne, plus une entreprise a des chances de subir un impayé. Après, en amont, des signes laissent présager un retard de paiement. Selon moi, un mail ou un courrier sans réponse doit alerter une entreprise. Ne pas hésiter alors à se diriger crescendo vers des actions de recouvrement. D’autres signaux plus faibles vont intervenir, comme une diminution du chiffre d’affaires avec un client, preuve sans doute que ce client se confronte à une baisse de son activité. Il pourrait ainsi éprouver plus de difficultés à respecter ses engagements.

 

Plutôt que de réagir, les PME doivent anticiper et se renseigner le plus possible – en amont – sur leurs clients afin d’éviter les impayés. Des outils existent puisque des entreprises de notation se chargent d’attribuer des notes pour mesurer la fiabilité de certaines entreprises. Nous, chez Recouvr’up, nous avons lancé une charte, Les Business Bonnes Pratiques, pour laquelle les entreprises signataires s’engagent à respecter certains principes comme payer les fournisseurs dans les délais ou émettre les factures avec un logiciel de facturation homologué. Un engagement moral qui rappelle que les relations commerciales reposent sur la confiance.

 

 

Propos recueillis par Geoffrey Wetzel - lire l'interview ici



25/09/2020
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