Le Journal du Recouvrement

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Défaillances d’entreprises : L’effet paradoxal de la crise du COVID

Dans la rubrique Actualité du crédit

 

 

Evolution.jpgAvec 32 184 défaillances d’entreprises en France en 2020, les défaillances d’entreprise sont au plus bas depuis 30 ans ! C’est près de 20.000 entreprises qui, du fait des mesures gouvernementales (report charges, PGE, chômage partiel…), échappent mécaniquement au dépôt de bilan. S’il apparaît donc difficile de tirer des conclusions sur la santé financière des entreprises françaises, Altares dévoile néanmoins dans son étude trimestrielle quelques signes inquiétants comme la proportion de liquidations judiciaires directes et le nombre élevé d’emplois menacés. La synthèse de cette étude en quelques lignes…  

 

 

Le nombre de défaillances d’entreprises plonge de 38,1 % pour atteindre son plus bas niveau depuis .... 1987 ! La crise de la Covid-19 est incontestablement l’une des plus grandes déflagrations que l’économie ait connu depuis les chocs pétroliers et la crise de 2008. Pour autant, tous les pronostics de défaillances ont été déjoués.

 

 

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Au-delà de la baisse sur le nombre de défaillances en 2020, cette  étude révèle que près de trois jugements sur quatre sont des liquidations directes.

Quant à la procédure de sauvegarde, elle a été davantage utilisée par les dirigeants d’entreprises de plus de 50 salariés (+12 % par rapport à 2019). En dessous de ce seuil, le recours à ce dispositif préventif recule de 15 %.

 

Les seules mesures de soutien aux entreprises n’expliquent pas à elles seules le fort recul du nombre de défaillances. Voici selon nous les 3 raisons de cette tendance à la baisse :

 

-          l’arrêt des Tribunaux de commerce en mars-avril,

-          l’instauration par ordonnance d’une période juridiquement protégée (favorable aux débiteurs)

-          et enfin les incitations des pouvoirs publics à privilégier les accords à l’amiable,

 

 

Concernant la répartition des défaillances, ce recul est visible sur l’ensemble du territoire.

 

Cinq régions enregistrent une baisse supérieure à 41 %.

 

En tête, la Corse à -47,5 % (212 défaillances) suivie à de l’Auvergne-Rhône-Alpes (3 568 ; -41,3 %) et du Grand Est (2 378 ; -41,3 %) puis des Pays de la Loire (1 298 ; -41,2%) et du Centre Val-de-Loire (1 027) en baisse de 41,2 %.

 

Dans quatre régions les reculs des défaillances se situent entre 37% et 41%. Occitanie (2704 ; - 40,1%), Nouvelle Aquitaine (2704 ; - 39,0 %), Hauts de France (2 424 ; - 38,3 %), Bourgogne (1235 ; - 37,2 %).

 

En dessous de -37% on trouve la Normandie (1367 ; - 36,6 %), et la Bretagne (1 296 ; - 36,0 %).

 

Les régions Ile-de-France (7 479 ; - 35,0 %) et PACA (3 499 ; - 34,6 %) ferment la marche.

 

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Même constat concernant les secteurs d’activité. Les défaillances sont en baisse partout.

 

 

BATIMENT : La construction tire la tendance sur l’année (-42,6 %) comme sur le 4e trimestre (-42,8 %). Baromètre général du secteur, la construction concentre le quart des défaillances (7 479) et enregistre une baisse de 42,6 % des procédures. La tendance est tirée par le gros œuvre (-44,2 %) et le second œuvre (-45,2 %). Le recul est également sensible dans les travaux publics (37,3 %) notamment dans les travaux de terrassement courants (-40,1 %). L’évolution est un peu moindre dans l’immobilier, notamment pour les agences immobilières (-28,8 %).

 

 

COMMERCE : Le commerce, deuxième poste de défaillances (6 996), a bien résisté sur l’année (- 38,2 %) et davantage encore sur le 4e trimestre (-43,5 %). Les défauts ont reculé au même rythme dans le commerce de détail (-37,2 %) ou interentreprises (-37,4 %). La baisse est rapide dans les magasins multi rayons (-40,7 %) en particulier en alimentation générale (-46,9 %). Le « bricolage et équipement du foyer » enregistre une amélioration de 40,2 %, tirée par le meuble (-44,4 %). Le nombre de défaillances est en retrait de 30 % dans le commerce d’habillement mais les spécialistes en maroquinerie et articles de voyage sont dans le rouge (+21,7%). Les grossistes en textile, habillement ont également bien résisté (-39,7 %). Pour le négoce de matériaux, dopé par la bonne activité de la construction, le nombre de défaillances a été divisé par deux.

 

 

SERVICES : Dans les services aux entreprises (4 511), la tendance globale (-32,6 %) masque des tensions. Les activités scientifiques et techniques restent solides dans le conseil en communication et gestion (-31,3 %) ou les services d’architecture et d’ingénierie (-34,8 %) mais les agences de publicité (-20,1%) sont fragilisées. Les services administratifs sont au vert dans le nettoyage de bâtiments (-44,4 %) ou la sécurité (-32,1 %) et l’organisation de foires et salons (-34,3 %) en dépit des difficultés rencontrées par l’évènementiel. En revanche, la sinistralité augmente dans les agences de voyage (+3,1 %) ou les services administratifs de bureau (+1,7 %).

 

 

INDUSTRIE : La baisse des défaillances d’entreprises (2 098 ; -39,2 % sur l’année 2020) accélère sur le 4e trimestre (- 43,1%). Dans l’alimentaire, la boulangerie-pâtisserie compte moitié moins de défaillances qu’en 2019. En revanche, les défauts sont en hausse dans la transformation et conservation de la viande de boucherie (+16%) et augmentent très vite dans la fabrication de bière. Dans l’industrie manufacturière, la tendance est très bonne dans les matériaux de construction (-45,5 %) ou dans l’imprimerie, qu’il s’agisse du pré-presse (-34,8 %) ou du labeur (-39,7 %). Dans les activités de métallurgie ou mécanique, la baisse est sensible en fabrication de structures métalliques (-46,4 %) mais seulement de 3,4% en mécanique industrielle. L’industrie textile (-15,5 %) est également orientée à la baisse dans la fabrication de vêtements de dessus (-20,9 %) mais davantage sous tension dans la fabrication de vêtements de dessous ou d’articles de voyage, de maroquinerie.

 

 

TRANSPORTS : Moins de 1250 transporteurs ont défailli en 2020 (-41,5 %) Le nombre de défaillances est en recul de 44,1 % en 2020 dans le transport routier de marchandises, une tendance qui s’accentue d’autant plus en fin d’année (-50,9 %). La baisse est de 46 % dans le transport de proximité et 42 % en interurbain. Le transport routier de voyageurs affiche une forte amélioration (- 73,2 %), portée notamment par l’activité de taxis (-40,5 %).

 

 

RESTAURATION : 3 300 établissements de restauration ont défailli en 2020, c’est 39,1% de moins qu’en 2019. Un recul encore plus remarquable en fin d’année (-44%). La restauration a fixé l’attention sur cette crise Covid et les craintes étaient fortes de voir le secteur défaillir massivement. Pourtant, moins de 1 900 restaurateurs traditionnels (- 39,2%) et 1 300 établissements de restauration rapide (-40,7%) sont entrés en procédure. Un peu plus de 110 traiteurs ont également défailli (-29,2%). Enfin, près de 700 débits de boisson (- 39,4 %) ont passé la porte du tribunal.

 

 

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Thierry Million (directeur des études Altares) parle bien d’anomalie statistique. Attention au rattrapage sur 2021, et les conséquences d’une probable forte augmentation du nombre de faillites, à savoir 55000 défaillances en rythme de croisière additionnées aux 20000 entreprises sauvées artificiellement cette année.

 

Le risque d’un effet domino est bien réel. Les entreprises « zombie » maintenues artificiellement en activité, génèrent probablement encore des dettes avec toutes les conséquences que l’on connait pour des créanciers déjà fragilisés…

 

Téléchargez l'étude complète ici

 

Philippe Bernis (Direct Recouvrement)

 



27/01/2021
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